À Toulon, le samedi 25 janvier 2014, avaient lieu les premières Assises Écosocialistes pour la Mer. Deux militants du PG 04 y étaient : ils nous racontent cette journée mémorable.
« Cette journée
respirait l'engagement du Parti de Gauche ; il n'était pas
besoin de se forcer pour mettre en évidence le bien fondé de nos thèses, personne
ne cherchait à convaincre. Bon, nous étions tous convaincus, mais je veux dire
que nous n'étions pas à la messe où l'on nous aurait servi le catéchisme...
Les organisateurs avaient prévu des tables rondes. En fait, les intervenants ont fait chacun un exposé dans leur domaine respectif, puis la salle a été invitée à poser des questions. Ceci le matin comme l'après-midi. Mais j'ai eu l'impression que les auditeurs étaient trop impressionnés et attentifs et que tout était trop neuf pour que les questions fusent spontanément. Le sujet est tellement vaste ! Et nous étions tous d'accord sur l'incurie des gouvernements passés et actuels.
Il y avait des gens de toute la
France : Nord, Paris, Bretagne, Savoie, Grenoble, Lyon, Pays Basque, Guadeloupe…
Plus de 300 personnes.
D'abord deux anecdotes :
Viviane et moi souffrons beaucoup
de devoir demeurer assis. Non pas parce que nous sommes impatients, mais parce
que nos articulations et nos rachis nous torturent quand nous leur imposons une
longue station figée (j'ai 75 ans, Viviane un peu moins, et ça coince un peu
partout dans nos carcasses)... pourtant, nous avons presque oublié nos douleurs
tant nous étions captivés.
Tout au long de la journée, les
horaires ont été respectés scrupuleusement. Je me suis dit alors que les
militants du PG sont des gens de parole, et que dans ces conditions les
libéraux qui maltraitent le peuple ont du souci à se faire !
Voici donc quelques éléments que
j'ai retenus. Ce qui n’y est pas ne manque pas d'intérêt : c'est juste que
ma mémoire a des limites !
La mer couvre environ les trois
quarts de la planète, et la France est la deuxième puissance maritime du
monde. Alors l'économie devrait
concerner aussi la mer, car l'économie écosocialiste, c'est aussi le progrès
sur terre pour tous les humains.
Voici un exemple édifiant des
pratiques actuelles et de la nécessité de ne pas laisser au capitalisme un
domaine aussi stratégique pour l'Humanité : La Scapêche, c'est à dire la
flotte de pêche d'Intermarché qui sévit dans l'Atlantique Nord, racle les fonds
marins jusqu'à 1000 m de profondeur. Ce procédé est complètement aveugle :
on ramène tout ce qui est ramassé par le chalut (qui bousille tout le sol marin
ainsi que sa faune), on choisit, et on jette le reste à la mer, c'est à dire
les poissons abîmés ou morts pour la plupart. Le procédé est absurde et
criminel. C'est que la pêche au large s'apparente à de la cueillette en milieu
sauvage ; on y fait ce que l'on veut, gratuitement, et on engrange les
profits. Et la Scapêche est subventionnée ! Comme nous l’a dit Isabelle
Autissier, on détruit des zones sous-marines qui nous sont totalement inconnues et qui renferment probablement des richesses fabuleuses comme tous les fonds marins.
C'est comme si on laissait un commerçant ravager la surface de la Lune avant de
l'avoir explorée. J'ai bien aimé cet exemple qui prouve que nous avons raison
de ne pas faire confiance au capitalisme productiviste : il ravage tout
pour son profit, sans souci du lendemain, car lorsqu'il n'y aura plus de
poissons il ira sévir ailleurs en laissant aux peuples le soin de réparer les dégâts.
Il y a déjà, dans les fonds des mers, des zones qu'on appelle « zones
mortes » et qui ont été ravagées par l'exploitation aveugle ! Ce ne
sont pas les coupables qui procéderont à la reconstitution des espèces
anéanties, quand cela est possible car la disparition d'espèces est parfois
irréversible (morue de Terre-Neuve...).
Toujours la privatisation des
bénéfices et la nationalisation des dégâts et des pertes, c'est un refrain
connu. On sait, hélas, que le Parlement Européen a rejeté la proposition
d'interdire cette pêche en eaux profonde... Les représentants des partis dits
libéraux ne sont donc pas seulement partisans d'exploiter les salariés, pour
eux tout doit être autorisé pour satisfaire le monstre : le profit !
La mer renferme des trésors qui
n'ont presque pas été explorés. Hervé Le Deit, chimiste, nous a cité des
exemples sidérants, comme ces élevages de vers de plage qui permettent la
fabrication de substituts du sang. Et ce que l'on peut faire, que l'on sait
faire, avec les algues : de tout, même du plastique (biodégradable bien
sûr!).
Elise Ballet, océanographe, nous
a expliqué la géographie des fonds sous-marins, cette vie extraordinaire à des
milliers de kilomètres sous l'eau, alimentée par les fumeurs noirs, ces volcans
immergés qui sont à l'origine d'une vie incroyable à 350° de température, à des
pressions des centaines de fois supérieures à la pression atmosphérique, et sans lumière !
Des bivalves, des crevettes, des poissons qui vivent grâce aux bactéries venant
du magma, des entrailles de la Terre !
Le port de Marseille devrait être
le premier d'Europe, mais la majorité des marchandises destinées au territoire
national arrivent à… Anvers, qui est de fait le premier port de France !
La faute aux investissements non faits dans le passé, pas prévus pour le
futur... incurie de la classe politique ! La faute également au manque de voies pour
évacuer les marchandises vers l'intérieur.
Lorsqu'un porte-conteneurs arrive
à Anvers, ce sont des centaines, des milliers de camions qui foncent vers le
sud pour distribuer les marchandises. Gabegie de nos dirigeants, serviteurs du
marché ultra-libéral.
Je ne fais que citer la fin
heureuse du dernier conflit à la SNCM où les marins ont gagné et obtenu la
satisfaction de leurs revendications qui n'étaient que justice et application
des lois françaises sur les bateaux partant du littoral national. On peut
trouver sur le net les détails... Sur ce sujet Frédéric Alpozzo, syndicaliste à
la SNCM, nous a montré les inepties des dirigeants et la force des syndicats.
Les douanes, car la mer, c'est
une frontière qui existe malgré ce qu'en a dit une ministre (je ne sais plus laquelle,
mais on la retrouvera!), que c'était un truc du XIXème siècle, preuve
dramatique de l'inconscience et de l'incapacité de gens investis de pouvoirs
(en principe) énormes. Manque de personnels entraînant l’impossibilité de
contrôler suffisamment les marchandises avec toutes les fraudes fiscales et les dangers
que cela représente pour la santé et la sécurité des populations.
Nos camarades du PG ont bien sûr
chacun à leur tour brossé des tableaux synthétiques sur chaque sujet tout en
nous permettant de suivre les liens entre le maritime, le ferroviaire et le
contrôle de nos frontières. Il y avait : Nicolas Mayer, animateur de la Commission Mer du PG ; Luc Léandri, Conseiller Régional PACA ; Eric
Coquerel, Secrétaire National du PG ; Marie Batoux, animatrice de la Commission Transport du PG ; et Corinne Morel-Darieux, Secrétaire Nationale du PG à l'Écosocialisme et à la Mer.
Younous Omarjee, député européen
de l'outre-mer, originaire de La Réunion, a fait une intervention dont le texte sera j'espère accessible
sur le net car il a été sublime. Sa maîtrise du sujet n'avait d'égal que celle qu'il
a de la langue française. Il nous a décrit les territoires outre-mer et leurs
atouts comme je ne l'avais jamais entendu. À côté, les documentaires à la Hulot
ou Bertrand ne sont que des crottes publicitaires. Cet homme est un génie du
Pacifique ! Il a emballé la salle, on n'arrêtait plus d'applaudir !
En fin de journée, Jean-Luc Mélenchon
a fait une synthèse, mais comme il l'a dit, nous avions eu une telle journée
d’éducation populaire, qu'il ne pouvait que préciser les choses qui avaient été
traitées toute la journée. Il a rappelé les atouts d'une économie de la mer, et
la nécessité de soustraire celle-ci des griffes du capitalisme productiviste
qui détruit tout, et, par nature, ne peut pas se réformer. Il a tout de même fait
un discours de plus d'une heure avant que nous puissions lui serrer la pince et
bavarder un peu avec lui.
Bon. Une longue route et une journée fatigante, nous sommes rentrés éreintés, mais contents.
Dernière heure : je vois que
l'essentiel est accessible sur le site du PG. Il faut prendre le temps de
visionner cela, c'est vital !
Jean-Marie et Viviane NIER, comité de Manosque »